Au fil des jours

A la Lanterne

lanterneAprès avoir parcouru la courte allée bordée de peupliers, la voiture noire s’arrêta devant la barrière de bois. Des gardes du corps évidemment étaient là, ainsi que des membres de la garde républicaine. Pas nécessaire de se camoufler ou de jouer la discrétion, tout le monde sait ce qu’est la Lanterne et à qui elle sert. Précédemment résidence de repos du Premier Ministre, la Lanterne à Versailles était devenue, depuis peu, résidence présidentielle.

La première dame de France était fatiguée, à peine remise du grand choc qu’elle avait subi récemment. Tout le monde s’accordait à dire qu’elle avait besoin de repos, de beaucoup de repos avant de pouvoir à nouveau paraitre en public devant les photographes et les caméramans du monde entier, toujours prêts à guetter la moindre image d’un personnage qui était devenu depuis peu la proie des paparazzis. Ces photographes, ils étaient là, devant la barrière, en nombre, avec motos puissantes, voitures et scooters bruyants. Mais dans la voiture, c’était le calme. Les vitres fumées mettaient l’intérieur à l‘abri de photos indiscrètes et le blindage du véhicule filtrait les bruits et les cris.

Elle arrivait seule pour le moment. Le Président de la République avait décidé de venir la rejoindre dans le courant de la soirée, voire le lendemain, le temps qu’elle s’habitue à cette nouvelle demeure. C’est que les rapports entre le chef de l’Etat et elle allaient beaucoup changer dans les jours à venir. L’arrivée d’une nouvelle personne est toujours source de déstabilisation, tout le monde en est d’accord. L’intrusion de cette nouvelle femme dans le couple présidentiel devra se faire en douceur, chacun devant faire un effort et bousculer ses habitudes pour faire un peu de place à la nouvelle arrivante.

La barrière s’ouvrit. La voiture pénétra dans la cour gravillonnée de la Lanterne. Une myriade de flashes crépitait autour de la voiture. Le chauffeur avança prudemment. Au passage du véhicule, la barrière se referma doucement. Les journalistes en seraient pour leurs frais, aucune déclaration n’avait été faite. La présidence de la république l’avait d’ailleurs annoncé.

L’hospitalisation de la First lady avait duré plus longtemps que prévu. Peu de nouvelles filtraient. Même le président, habituellement loquace, était plutôt sur la réserve. Ses déclarations à la presse avaient été timides. Il avait dit le strict minimum, guère plus, et souhaitait garder les moments à venir dans l’intimité du couple, à l’Elysée ou ailleurs. D’ailleurs, il ne pouvait pas se permettre la moindre relâche. Son travail l’accaparait trop et quelques jours de repos n’étaient pas les bienvenus en ce moment. Le pays était en forte crise, la France n’aurait pas accepté le moindre relâchement. Il ne devait pas oublier qu’il avait été élu pour gouverner le pays, à cinquante ans passés et que l’événement qui le taraudait actuellement était plutôt l’apanage d’hommes plus jeunes. « Ce n’est plus de ton âge, il y a un âge pour tout » lui avait lancé son meilleur ami alors que le président  venait de lui apprendre la nouvelle autour d’un verre de vin blanc.

Les médecins avaient prescrit un repos complet et rapide. C’est pourquoi le couple présidentiel avait choisi d’arriver ce samedi à la résidence de Versailles, non loin de l’Elysée pour passer quelques jours de calme après la tempête médiatique des jours précédents.  La Première dame avait prévu de rester ici une petite semaine, le Président la rejoignant au mieux de son emploi du temps en fonction de ses déplacements prévus de longue date.

La France était contente de sa voir que celle qui était chaque jour aux côté du chef de l’Etat pour le soutenir et l’appuyer, se reposait dans une résidence d’état. Quelques pinailleurs avaient osé poser des questions déplacées : « Est-il normal que l’Etat paie pour le calme et repos de cette dame ? » « Après tout, c’est nos sous, c’est nous qui payons », « Moi aussi, en pareil cas, j’aimerais bien me reposer dans une résidence de luxe », « Sale profiteuse, c’est pas parce qu’elle couche avec le président qu’elle a droit de se faire entretenir par la République !! »

Les noms d’oiseaux volaient bas dans certains milieux. Certaines personnes étaient allées jusqu’à demander qui avait payé l’hôpital. « Pourquoi a-t-elle été hospitalisée plusieurs jours à nos frais ? » « C’est un véritable scandale ». « Est-ce que c’est la sécu qui a payé les gardes du corps et les flics chargés de sa sécurité pendant tout ce temps ? »

Mais bien à l’abri derrière les hauts murs de la Lanterne, Carla Bruni Sarkozy ne s’en souciait guère. Elle n’avait que faire des sarcasmes et des « on dit ». Elle était depuis plusieurs années aux côtés du Président, l’accompagnait dans ses déplacements officiels, se tenait à ses côtés lors de repas avec les dirigeants du monde entier, personne n’avait de reproches à lui faire et elle avait l’esprit tranquille.

Le 31 octobre 2011, fatiguée par sa grossesse et son accouchement, Carla Bruni Sarkozy arrive à la Lanterne pour y prendre quelques jours de repos. Où est le problème ?

© JM Bassetti 19 Janvier 2014. Tous droits réservés.

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© Amor-Fati 19 janvier 2014 Tous droits réservés. Contact : amor-fati@amor-fati.fr

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